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  • C'est leur histoire

    [Témoignage] Mineurs non accompagnés, leur accompagnement est une nécessité  

    Un an durant, Paul, étudiant en langues étrangères à Paris, a suivi une centaine de mineurs non accompagnés dans le cadre d’un engagement en service civique, les accompagnant aux cours de français et appuyant leurs démarches juridiques. Dans ce témoignage, il détaille combien cette expérience s’est révélée être un enrichissement mutuel et appelle à un changement de regard sur ces adolescents en situation de vulnérabilité.

    Le lycée Voltaire dans le 20e arrondissement de Paris accueille dans ses murs des mineurs non accompagnés pour leur permettre de suivre des cours dans de bonnes conditions.

    J’ai passé mon bac il y a quelques années déjà et je n’imaginais pas franchement remettre les pieds dans un lycée. Pourtant, depuis plus d’un an je me rends chaque mercredi après-midi au lycée Voltaire dans le 11e arrondissement de Paris. L’odeur familière de la cantine, les carnets de correspondance où l’on oublie de consigner les absences et les pions affables. Rien n’a changé.

    Rien ou presque. Je suis de retour au lycée pour accompagner et accueillir une vingtaine de mineurs non accompagnés (MNA) dans l’apprentissage de cours de français. Ils s’appellent Amadou, Moussa ou Djibril et viennent de Guinée-Conakry, du Sénégal ou du Mali. Tous ont pour point commun d’être livrés à eux-mêmes dans l’attente de la reconnaissance de leur minorité. Une procédure pouvant s’étaler sur plusieurs mois, voire un an. S’ils sont reconnus mineurs, ils seront pris en charge par l’aide sociale à l’enfance (ASE).

    La promesse d’un avenir hors de la rue

    Ces adolescents, nous les apercevons souvent la nuit, tentant de se réchauffer tant bien que mal dans leur tente. Quand ils en ont une. À la télévision, ils sont systématiquement représentés dans des sacs de couchage, avec au loin des CRS (corps spécialisé de la Police nationale en France- NDLR). Ce sont ces images qui contribuent à asseoir l’idée que leur futur est limité à la rue.

    Difficile alors de les imaginer dans une classe d’école. Pourtant, il suffit de les voir tartiner leur cahier pour constater combien leur envie de réussir est grande ! À Paris, une myriade d’associations a fait le pari de croire en eux comme Droit à l’école ou Paris d’exil. C’est dans cette dernière que je me suis engagé.

    Heureusement, au quotidien, je ne suis pas seul. Je travaille en binôme avec Tanel, jeune diplômé en ingénierie, qui a souhaité s’engager dans un rôle porteur de sens via un contrat de volontariat en service civique. Le premier contact avec les jeunes se fait le vendredi à la bibliothèque Naguib Mahfouz (20e arrondissement) : c’est là entre les rangées fournies de livres qu’ils apprennent à identifier le sujet et à conjuguer les verbes. Une ambiance studieuse qui tranche avec l’agitation des rues avoisinant la bibliothèque. 

    Des lycéens comme les autres

    Le mercredi, une autre routine se met alors en place. Avec Tanel, nous accompagnons les jeunes dans la classe d’accueil du lycée Voltaire. Un projet né en 2018 à la suite d’une action de sensibilisation pour scolariser des jeunes MNA et soutenue par des professeurs de l’établissement. 

    J’ignorais que l’on pouvait accueillir si aisément! Tant, en règle générale, tout bloque au niveau de l’administration, qui au nom d’une soi-disant « neutralité politique » refuse de s’engager. Mais non, pas de ça au lycée Voltaire, où les MNA sont considérés comme les autres élèves.

    Ils suivent des cours de philosophie et de mathématiques, possèdent des cartes d’étudiant, des attestations de scolarité … C’est tout juste si on n’organise pas une élection de délégués de classe. Bref, des lycéens comme les autres.

    « On pourra revenir ? »

    Avec Tanel, nous sommes fascinés de constater, cours après cours, combien tout se déroule de façon simple et évidente. En salle des profs, les avis sont unanimes : «ils sont plus sages que mes 4èmes !», lance régulièrement une enseignante.

    Les jeunes aussi sont surpris d’être là. « Mais, on pourra revenir mercredi prochain ? », demande systématiquement Ibrahim. A la fin du cours d’informatique, ils se prennent en photo devant les ordinateurs, comme pour immortaliser ce moment tant attendu.

    Entre les cours de français et les ponctuels accompagnements juridiques, les semaines sont denses. La satisfaction de s’être bien occupé des jeunes laisse place le week-end à un sentiment de fatigue intense. Mais, mon sentiment d’impuissance – en croisant des jeunes à la rue – se dissipe aussi avec le temps.

    Le pari de faire entrer ces ados à l’école est payant. L’année passée, plus de 500 jeunes ont bénéficié de cet accompagnement resserré. Nombreux sont désormais ceux pouvant se targuer de bons résultats lorsqu’ils intègrent des CAP (Certificat d’aptitude professionnelle), voire des Bacs pro.

    Quand ils reviennent nous voir un an après, fiers de nous montrer leur bulletin scolaire, nous nous réjouissons pour eux. Et, l’émotion est palpable quand ils nous lâchent : « nous avons retrouvé confiance, c’est grâce à vous ».

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