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    Les réalisatrices Égyptiennes à l’honneur à la mostra de Valence

    Haro sur le cinéma qui relègue des femmes à des rôles secondaires. La 34e Mostra de Valence (Espagne) qui s’achève ce 3 novembre, fait la part belle aux réalisatrices égyptiennes. Censure, rôle des femmes dans la Révolution de 2011 ou encore clichés véhiculés par la société occidentale, ces créatrices nous ont fait part de leurs […]

    Haro sur le cinéma qui relègue des femmes à des rôles secondaires. La 34e Mostra de Valence (Espagne) qui s’achève ce 3 novembre, fait la part belle aux réalisatrices égyptiennes. Censure, rôle des femmes dans la Révolution de 2011 ou encore clichés véhiculés par la société occidentale, ces créatrices nous ont fait part de leurs combats et de leurs aspirations. Rencontre.

    Sidney Cadot-Sambosi


    Crédit photo : Pablo Ortuño

    Après avoir accueillie en 2018 une rétrospective de films d’auteurs palestiniens (dont Wisam Al Jafari, Salah Abu Nimah ou Sami Zarour), la Mostra de València réaffirme son rôle de passeur dans le dialogue Nord-Sud en prêtant attention à l’industrie cinématographique d’Afrique du Nord et des pays du sud de la Méditerranée.

    Ainsi, le festival entame en 2019 une collaboration avec la plate-forme ‘Filmlab: Palestine’, créée en 2014, qui a pour mission de documenter et de collecter la mémoire collective palestinienne, ainsi que les voix individuelles uniques des Palestiniens dans les territoires occupés et à l’étranger. Son objectif est bien d’élargir et d’entretenir la culture cinématographique existante en Palestine, tout en fournissant le soutien technique et artistique indispensable aux voix et talents émergents du cinéma palestinien.

    De plus, le cycle consacré cette année à « La Révolution des femmes dans le cinéma égyptien » offre l’occasion de voir onze films produits entre 2002 et 2018 de neuf réalisatrices égyptiennes. La projection des films est complétée par une table-ronde durant laquelle six réalisatrices discuteront du rôle et de la condition des femmes dans le cinéma égyptien avec Awatef Ketiti, professeure de communication audiovisuelle à l’Université de València.

    L’importance et la qualité de la production cinématographique en Égypte est particulièrement remarquable dans l’industrie du film au sein du monde arabe pour deux raisons. Premièrement, du point de vue historique, le cinéma égyptien est apparu presque simultanément avec l’émergence du cinéma européen, 30 ans avant la naissance du 7ème art dans d’autres pays arabes. Deuxièmement, en raison de l’influence indéniable du cinéma égyptien, de son esthétique et de sa portée éthique et politique, dans le reste des pays arabes pendant de nombreuses décennies.

    Cette année le festival rend également hommage au cinéaste espagnol Antoni Pérez Canet (Toni Canet), au cinéaste et scénariste italo-turc Ferzan Özpetek et à la scénariste italienne Liliana Cavani, avec des programmes spéciaux pour chacun d’entre eux, ainsi qu’un programme de films de comédies italiennes de l’âge d’or de ses réalisateurs (Federico Fellini, Roberto Rossellini, Dino Risi, Mario Monicelli, Nounou Loy, Luigi Zampa et Pier Paolo Pasolini).

    La censure patriarcale dans le cinéma égyptien

    Le 26 octobre 2019 à la Fundacio Bancaixa, la table-ronde de « La Révolution des femmes dans le cinéma égyptien » s’est concentrée sur la réalité politique et culturelle, et notamment cinématographique, en Égypte. Les réalisatrices Hala Khalil, Amal Ramsis, Kamla Abou Zekri, Nadine Khan et Mariam Abou-Ouf ont raconté les difficultés qu’elles rencontrent pour faire du cinéma d’auteur dans un pays où les aides d’État à la production n’existent quasiment pas et où la censure, établie sous le régime antérieur, fonctionne toujours même si elle tend à s’atténuer.

    En effet, après la Révolution de 2011 et les élections de 2014, l’opinion publique égyptienne s’est transformée et manifeste un grand refus de la politique culturelle conservatrice. « Si je me mets à l’écriture d’un nouveau scénario aujourd’hui, je ne pourrais pas m’empêcher d’anticiper ce qui sera oui ou non accepté par les autorités et les instances de représentations du pays. L’auto-censure est encore ancrée dans le processus de création à l’heure où je vous parle », explique Kamla Abou Zekri, réalisatrice de One-Zero (2009) et A Day for Women (2016).

    Crédit : Libre de droit

    En effet, selon Nadine Khan, réalisatrice du film Chaos, Disorder (2012), le principal problème de l’industrie cinématographique en Égypte est la censure. Il faut savoir que, sous le régime d’Hosni Moubarak, la censure avait rejeté son film. Ce n’est qu’après la Révolution égyptienne de 2011 que sa diffusion avait été relancée. Nadine Khan n’est pourtant pas très optimiste quant à la situation actuelle : « il y avait plus de liberté juste après les soulèvements de 2011 qu’aujourd’hui », assure-t-elle.

    Une autre censure informelle, plus insidieuse, existe aussi. Et, elle occulte d’autres aspects de la vie quotidienne des femmes en Égypte. Elle provient des clichés véhiculés par les sociétés occidentales. « En Occident, le débat sur la situation des femmes arabes se concentre sur deux questions principales : le voile et la sexualité des femmes. Les gens ont tort de penser que le voile est le principal problème. Il y en a beaucoup d’autres, telles que les inégalités entre les hommes et les femmes dans beaucoup de domaines de la vie quotidienne ou le manque de liberté », signale Kamla Abu Zekry

    La révolution des femmes égyptiennes par le septième art

    Rappelons combien les femmes égyptiennes ont joué un rôle inhabituel dans la Révolution de 2011, qui a modifié certains fondements de la société patriarcale égyptienne. « Je pense que ma participation aux révoltes du Printemps Arabe m’a aidé à élaborer des idées liées aux révolutions d’une manière différente, à analyser le fait humain dans le discours historique de manière plus mature. Cela fait des décennies que les mouvements sociaux agitent l’Égypte et le monde entier, et nous devons récupérer notre mémoire historique de manière plus constructive pour qu’elle serve de guide pour créer un changement social réel et durable », explique Amal Ramsis, réalisatrice du documentaire You Come From Far Away (2018).

    Aussi, toutes les réalisatrices participant à la conversation s’accordent-elles sur un point : les manifestations qui ont renversé Hosni Moubarak en 2011 n’ont pas permis de redonner toute la place qui revient de droit aux femmes dans le monde du cinéma. « La culture dans les années 50 et 60 était différente, et même le gouvernement soutenait les femmes. Maintenant, la politique culturelle n’est plus comme ça » rappellent-elles, conscientes que le courant majoritaire du cinéma égyptien relègue actuellement les femmes à des rôles secondaires.

    Malgré tout, l’un des points positifs mentionné dans la conversation, tient au fait qu’après l’apparition du cinéma égyptien sur la scène internationale dans les années 80, les cinéastes égyptiens portent un regard plus féminin sur le monde. Le cinéma a pris une nouvelle dimension dès lors, celle d’un outil essentiel à la fois pour stimuler la société et mettre en lumière les combats pour l’égalité des droits entre les femmes et les hommes.

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