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    « Comme nous existons » de Kaoutar Harchi, ou comment retrouver une dignité volée

    « Qu’il y ait entre l’acte d’écrire et l’acte de vivre une confusion volontaire ». Sujet intime, objet politique et témoin sensible, « Comme nous existons » est un récit virtuose éminemment littéraire, une enquête autobiographique de Kaoutar Harchi ( « À l’origine notre père obscur », « Je n’ai qu’une langue, ce n’est pas la mienne »). L'auteure y retrace son histoire, de ses premiers souvenirs à l’ultime décision de servir la vie par l’écriture, de se balancer parfaitement entre l'un et l'autre. 

    Une critique de Laure Woestelandt/ Photo © Emmanuelle Le Grand – DR


    Dans le salon familial la jeune Kaoutar regarde avec ses parents la vidéo de leur anniversaire de mariage. Le temps d’avant. Avant le départ du Maroc, avant l’arrivée en France dans les années 1980. Avant toutes ces choses qu’on appelait la joie. Elle ne résonne plus vraiment dans les murs du nouvel appartement. Comment la joie revient et demeure face à l’usure et la tristesse ?

    Des migrations d’abord intimes

    Raconter son histoire, celle d’une jeune fille de parents marocains émigrés en France mais pas seulement. Celle d’une réussite que l’on voudrait qualifier de transfuge de classe, mais pas seulement. « Comme nous existons » de Kaoutar Harchi ne se réduit pas au seul récit de l’histoire d’une « jeune fille de cité, issue de l’immigration ». S’il est question de migrations et d’exils dans ce livre, ils sont d’abord intimes : quitter l’enfance, quitter son quartier, se séparer de ses parents sans perdre pied, sans couper ses racines et pire trahir les siens.

    Nous cheminons avec l’auteur dans les souvenirs de ces époques, de ces lieux et tous les événements fabriqués par la mémoire.

    « Honte d’avoir eu honte »

    Des rives du canapé familial aux première pages de ce livre, l’auteure navigue dans les eaux troubles de la honte d’exister, de la « honte d’avoir eu honte », elle se heurte aux vagues du racisme institutionnel, aux inégalités de classes et de genres.

    Ces expériences de mépris et d’exclusion viennent nourrir ses interrogations intellectuelles, éveiller sa conscience politique. Elle trouve une boussole dans la sociologie, des livres et des auteurs qui lui indiquent le lieu d’une possible présence, les conditions d’une juste représentation, pour dynamiter les hiérarchies de classe et de genre.

    Du « je » au « nous »

    L’acte d’écrire coïncide pour l’auteure avec celui de partir, de quitter ses parents, son quartier, avec toute la culpabilité et les justifications qui en découlent. Écrire pour partir sans trahir ? Retenir ce qui fuit, ce qui a été, et faire quelque chose de son nom, du nom de ses parents.

    Écrire alors pour rendre aux siens une dignité volée, pour parler enfin de notre lieu plutôt que d’être évoqué par les mots des autres (l’école, les médias, la police). Et aussi peut-être pour s’exiler de ses assignations et exister enfin, poussée par ce désir ardent de composer des phrases.

    Kaoutar écrit du lieu sensible de l’intime, du « je », pour évoquer ce « nous » politique. Un récit autobiographique qui nous emporte en cette rentrée littéraire.

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