Ces voix qu’on entend malgré le silence : notre sélection de Message to man
Message to man, le festival du film international du documentaire de Saint-Pétersbourg, a réussi à souffler sa trentième bougie malgré la froideur apparente des écrans, lors d'une édition au mois de novembre presque entièrement menée en ligne. Parmi les différentes catégories de la compétition, les longs-métrages internationaux auront permis à des chemins de vie hors du commun d'être vus et entendus, en dépit du bruit sourd d'une menace sanitaire mondiale. Du Mexique à la Roumanie, des histoires de famille, de résilience aussi, cap sur les trois documentaires qui nous ont subjugués.
Photos : DR
Bien que la pandémie mondiale et l’annonce de vaccins aient volé la vedette à la culture et notamment au cinéma, Saint-Pétersbourg a réussi à se battre bec et ongles pour maintenir son festival du film au mois de novembre. Evénement contre toute attente, brillamment réussi.
Ainsi, malgré le fait que l’édition 2020 de Message to Man se soit presque intégralement déroulée en ligne, les voix de quelques personnages de documentaires ont réussi à se frayer un chemin vers nos oreilles, toutes ouïes. Et nos yeux grands ouverts.
Et le gagnant est… La Mami
Parmi ces voix, celle de La Mami a particulièrement résonné. C’est celle d’une vieille dame travaillant dans un cabaret de Mexico. Celle d’un ange gardien de femmes fortes mais en difficulté, mères pour la plupart, qui essaient désespérément de subvenir aux besoins de leur famille, en étant entraineuses la nuit venue.
Alors que leurs histoires s’enchaînent devant son regard apparemment froid, elle leur donne de la force, une nuit après l’autre. Réalisé par Laura Herrero Garvín, ce casting entièrement féminin a reçu le prix du meilleur documentaire international par un jury tout aussi féminin, ému par des portraits délicats, malheureusement trop rarement représentés sur grand écran avec autant de beauté et de précision.
Acasa, la raison du plus fort
Il serait cependant injuste d’évoquer cette édition de Message to Man sans évoquer Acasa, du réalisateur roumain Radu Ciorniciuc, tout aussi émouvant. Alors que Ciorniciuc nous plonge dans l’existence d’une famille bohémienne vivant en dehors de la ville, nichée dans un parc naturel protégé, nous voyons tout leur monde et leur culture s’effondrer.
La mairie les force à quitter leur habitat et leur mode de vie pour s’installer en ville, où aucune des normes sociales ne semblent coller à leur éducation.
Malgré le fait que cette famille de onze personnes soit prise en charge par les services sociaux et le système éducatif, des fissures ne tardent pas à apparaitre au sein du foyer. L’ainé de la fratrie décide de se libérer de son ancienne vie en pleine nature et d’adopter un mode de vie présenté comme plus « moderne ».
Face au désespoir d’un père autoritaire, dont le seul souhait est de quitter le centre urbain et d’une mère protectrice qui sera toujours du côté de ses enfants, la fratrie est tiraillée entre un héritage « marginal » et une voie « moderne ».
Ce qui transpire à travers la caméra de Ciorniciuc, ce n’est pas seulement le fossé entre les générations ou les différences culturelles, mais plutôt l’amour et l’attention qui abonde dans cette famille et sa relation éternelle avec la nature.
Cependant, la force de ce film réside dans le fait qu’il déclenche une réflexion plus profonde : qui détient la vérité sur un mode de vie acceptable ou non ? Quand plusieurs cultures cohabitent, laquelle prévaut légitimement sur les autres ? Sous couvert de bonnes intentions apparentes, la société moderne agit-elle comme un dictateur ou un facilitateur avec ses citoyens ? Quand il s’agit d’accepter les autres, qui est réellement l’autre et qui l’emportera ?
En somme, un puissant témoignage sur notre condition humaine.
Petit Samedi, accro à l’amour
Loin de la Roumanie, c’est vers un autre genre de vie que la caméra de Paloma Sermon-Daï nous emmène. Une autre affaire de famille à huis clos cette fois-ci, où la proximité n’est cependant jamais un problème.
Le personnage principal, Damien, héroïnomane de 43 ans, n’est autre que le frère de la réalisatrice. Alors qu’il lutte contre sa toxicomanie pour retrouver une vie normale, le deuxième personnage du film devient presque aussi important que lui : sa mère.
Cette femme forte et drôle est littéralement au cœur de ce conte de famille. Au fur et à mesure que l’histoire se déroule, nous en venons à comprendre qu’elle a peiné à élever ses premiers enfants, dans un environnement violent, où Damien était l’aîné.
Aux prémices de sa vie, ce dernier a tenté de protéger sa mère et ses jeunes frères et sœurs contre ces maltraitances.
Le film fait fi de tous les clichés que l’on pourrait avoir sur la toxicomanie et ses victimes.
Damien apparaît comme un personnage solaire, sa mère, elle, fait figure de vraie lionne, faisant de son mieux pour protéger et aider son fils adoré. La façon dont Sermon-Daï a abordé le sujet de la dépendance à travers la relation mère-fils est d’une sincérité déconcertante. Tout simplement brillant.
Les projections de films présentés au festival seront annoncées sur le site web en fonction des développements sanitaires : https://message2man.com/
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