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  • C'est leur histoire

    Exil et déclassement professionnel : le grand vertige

    Je m'appelle Thelma Chikwanha. Journaliste au Zimbabwe, réfugiée en France, j'ai affronté le déclassement professionnel. Tour à tour femme de ménage et nounou, j'appelle à ne pas céder au fatalisme malgré les difficultés.

    L’un des défis les plus difficiles à relever fut de fuir mon pays d’origine, le Zimbabwe, et de m’installer dans un pays dont la langue et la culture étaient totalement différentes des miennes. Étudiante en sciences politiques à l’Université du Zimbabwe, j’ai idéalisé les idéaux de la Révolution française qui a inauguré une ère de réformes politiques, sociales et culturelles. Bien que cette révolution ait été accompagnée de violence et de troubles, nous ne pouvons nier son héritage: elle a jeté les bases de l’émergence de sociétés démocratiques modernes et de la reconnaissance des droits fondamentaux de l’homme. Lorsque j’ai été reconnue comme réfugiée le 6 novembre 2017 et que j’ai été informée des principes fondamentaux régissant la République française tels que l’Égalité, la Liberté et la Fraternité, j’étais très optimiste quant à mon avenir. Alors que l’égalité signifie le principe de l’égalité devant la loi et le traitement de tous les citoyens, quel que soit leur origine, leur statut social, leur race, leur religion ou leur genre, cela semble bon sur papier. Cependant, ce n’est certainement pas le cas pour de nombreux
    réfugiés et immigrants en France.

    Thelma Chikwanha participe notamment aux ateliers d’éducation aux médias et à l’information de Guiti News.

    Stéréotypes et perceptions

    Je me sens parfois discriminée, probablement en raison de mon sexe et de ma race. Par exemple, j’ai récemment reçu une offre de formation en tant qu’assistante à domicile de la part d’une organisation
    qui m’avait autrefois aidée avec des cours de français. Ils m’ont dit qu’ils avaient examiné mon profil et qu’ils croyaient fermement que j’étais une bonne candidate pour leur programme de formation de 3
    mois. Le fait que j’ai étudié le journalisme et les sciences politiques dans un établissement d’enseignement supérieur, mes 20 années de journalisme n’ont pas été pris en considération. (NDLR : Thelma était responsable de la direction éditoriale du Group Political Editor pour Associated Newspapers du Zimbabwe, deuxième groupe médiatique du pays.)

    J’ai décidé de leur demander pourquoi ils croyaient que mon profil était parfait pour la formation en soins à domicile. Ils n’ont tout simplement pas eu de réponse à ma question. La vérité à mes yeux est que mon profil correspond en effet au profil d’une assistante à domicile, parce que je suis à la fois réfugiée et femme noire. Il est souvent attendu que ces emplois soient les meilleurs pour les femmes noires. Il suffit de faire une promenade dans le parc pour voir que la plupart des nounous qui poussent des poussettes sont des femmes noires. C’est la triste réalité pour la plupart des immigrés. Ils doivent souvent accepter une rétrogradation professionnelle simplement pour gagner leur vie, non seulement en France mais aussi dans la société occidentale.

    La lutte pour l’intégration

    À mon arrivée en France, je ne parlais pas français comme la plupart des réfugiés arrivant ici. Cela a sans aucun doute rendu le chemin vers l’emploi très difficile. Les barrières linguistiques, le
    manque de reconnaissance des qualifications et les différences culturelles constituent des obstacles redoutables à l’accès au marché du travail. Pendant 6 ans, les seuls emplois que j’ai pu obtenir étaient
    dans le domaine du travail domestique. Je fus tour à tour femme de ménage et nounou. J’apprécie la compagnie des enfants. Or, traiter avec leurs parents fut parfois un cauchemar, à l’exception de quelques-uns. Ce n’est pas surprenant. Des statistiques récentes indiquent qu’une infime fraction des réfugiés trouvent un emploi dans leur première année dans le pays. Environ 42 % des réfugiés en
    France ont du mal à trouver du travail, faisant face au chômage et au sous-emploi malgré leurs aspirations à l’autosuffisance. Néanmoins, je pense faire partie des chanceux. En mars 2023, j’ai trouvé mon emploi non domestique lorsque j’ai été recrutée par Guest First, l’une des plus grandes entreprises touristiques en Europe. Je fais également partie de l’équipe éditoriale de Guiti News, ce qui est en fait très important pour moi car cela me permet de continuer mon travail de journaliste.

    Abattre les barrières

    Malgré les défis à surmonter après l’exil, il existe des histoires de résilience et de succès. Des organisations comme L’Oréal, Each One et de nombreuses autres initiatives dédiées à l’intégration des réfugiés jouent un rôle vital dans le comblement du fossé entre les personnes déplacées et le marché du travail. Grâce à des cours de langue, à des formations professionnelles et à des programmes de mentorat, les réfugiés sont équipés des compétences et du soutien dont ils ont besoin pour naviguer dans les complexités du processus de recherche d’emploi. Dans le parcours de déplacement jusqu’à l’emploi, confrontés à des obstacles redoutables, ils démontrent également une résilience et une détermination remarquables. En abordant les obstacles systémiques, en favorisant les partenariats et en célébrant ces trajectoires, nous pouvons débloquer des opportunités et créer des voies vers l’autonomisation économique des personnes déplacées.

    Ensemble.

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