Le 29 mars dernier, Netflix a mis en ligne une série de six courts métrages coproduits avec l’Organisation des Nations Unies pour l’Éducation, la Science et la Culture (Unesco) mettant en avant l’Afrique. « Empreintes de traditions, de patrimoine, mais aussi d’innovation et de créativité, les expressions culturelles de l’Afrique du 21e siècle sont aussi diverses et dynamiques que sa population », selon Ernesto Ottone, sous-directeur général de l’Unesco pour la culture. « Contes populaires africains réinventés » s’inscrit dans le projet de l’organisation de développer le cinéma africain. Une industrie « susceptible de créer 20 millions d’emplois et de générer 20 milliards de dollars de revenus par an sur le continent », peut-on ainsi lire dans un rapport commissionné par l’ONU et publié en 2021 sur le potentiel de l’industrie du film en Afrique.
A l’heure actuelle, si le Nigéria se signale par le dynamisme de Nollywood, les moyens mis en œuvre dans ces productions vidéo demeurent modestes, alors que l’Afrique du Sud sert essentiellement de pays de cocagne pour les tournages de grosses productions hollywoodiennes.
Les six courts métrages sélectionnés parmi les 2000 candidatures sont le fruit de cinéastes venus d’Afrique du Sud, du Kenya, de Mauritanie, du Nigéria, d’Ouganda et de Tanzanie. Les lauréats ont remporté un prix de 25 000 dollars chacun auxquels se sont ajoutés 75 000 dollars pour la réalisation de leur film. C’est au total une enveloppe de 600 000 euros que le géant du streaming et l’Unesco ont déployé pour ce projet.
Du cinéma qui emprunte à tous les genres
Dystopie, science-fiction, fantastique, drame, horreur etc, les six épisodes sont totalement indépendants les uns des autres et offrent une palette variée de genres cinématographiques. Ils ont cependant en commun de s’approprier les codes du conte traditionnel pour les revisiter d’une façon résolument moderne.
« Zabin Halima » (Le choix d’Halima), de la réalisatrice nigériane Korede Azeez nous propulse au XXIIème siècle. Un futur où une majeure partie de la population a fait le choix de vivre dans un monde virtuel. Halima, une jeune fille originaire d’un village isolé se tourne vers un étranger pour éviter un mariage arrangé.
« Katera of the Punishment Island » (Katera et l’île du châtiment), du cinéaste ougandais Loukman Ali, retrace l’histoire d’une femme qui veut se venger de l’homme qui l’a exilée avec d’autres femmes sur une île et qui a tué son bébé. C’est aussi une plongée dans l’époque coloniale et ses ravages dans ce pays d’Afrique de l’Est.
« Anyango and the Ogre » (Anyango et l’Ogre), de la Kényane Voline Ogutu est un conte fantastique pour enfants. Il traite avec subtilité et poésie de sujets graves comme les violences intrafamiliales.
« Enmity Djinn » (Le djinn du désaccord), du réalisateur Mauritanien Mohamed Echkouna est de loin le plus horrifique. Dans ce conte d’horreur, trois générations d’une même famille sont confrontées à un génie ancestral.
Avec « Katope » de Walt Mzengi Corey, c’est toute la problématique des sécheresses de plus en plus récurrentes qui est abordée. Dans un village reculé en Tanzanie, Katope fait la rencontre d’un oiseau de pluie et débute une quête pour faire tomber l’eau sur les villageois qui sombrent dans le désespoir.
Enfin avec « MaMlambo » la réalisatrice sud-africaine Gcobisa Yako signe un épisode résolument féministe. Elle invoque la créature mythique de « la rivière sans retour », qui veille sur les femmes en souffrance.
Loin des clichés sur le cinéma africain, cette série met au contraire en lumière tout son potentiel. C’est une exploration des contes, mythes et paysages méconnus de diverses cultures du continent.